Gut Training : une autre dimension de l'entraînement

 


Dans les sports d’endurance en particulier, on se cache souvent des problèmes digestifs qui surviennent à l’effort. Il y a la difficulté de l’épreuve qu’il faut surmonter, la concurrence à défier pour les plus compétitifs, sans oublier les réactions du corps auxquelles il faut s’adapter. Si l’entraînement physique et la préparation mentale entrent, évidemment, en ligne de compte pour accomplir un objectif sportif, l’entraînement intestinal émerge progressivement dans le milieu.


Les troubles digestifs qui surviennent à l’effort sont une des principales causes d’abandons sur marathon et autres longues distances. Car en effet, 30 à 50% des coureurs en souffrent. Mais grâce aux connaissances actuelles autour de la nutrition chez le sportif, il semblerait qu’un entraînement digestif adapté remédie au problème. Encore faut-il savoir comment s’y prendre et surtout quoi prendre pour habituer l’organisme à l’ingestion pendant la course.


Un entraînement de l’intestin ?

Le « Gut Training », littéralement traduit comme entraînement intestinal, est une notion émergente dans le monde des sports d’endurance. Le but est d’entraîner son intestin à absorber les fluides, électrolytes et divers nutriments au cours d’un effort physique prolongé. Derrière tout cela, l’objectif est aussi de minimiser les risques de troubles digestifs comme les crampes d’estomac, les vomissements, les diarrhées ou les simples ballonnements. Durant cet entraînement, que l’on intègre aux sorties longues par exemple, il revient d’appliquer un protocole précis. De semaine en semaine, le coureur augmente progressivement, à l’image de sa charge d’entraînement, la quantité de glucides et de liquides ingérée pendant son effort. L’idée est de se mettre dans les conditions propres à celles d’une compétition.


L’organisme et son équilibre

Une des clés de la performance se situe dans la nutrition. Bien que ma spécialité ne trouve pas sa racine dans la science en général, je m’intéresse néanmoins aux phénomènes produits dans le corps et qui influencent les performances sportives. Je me suis penchée sur un article tiré d’un magazine, nature Trail, qui traitait de la balance acido-basique, sujet vulgarisé par l’experte Anne-Lise Collet, ingénieure chimiste, naturopathe et micro-nutritionniste. Elle définit la balance acido-basique tel qu’un « équilibre métabolique qui contrôle le niveau d’acidité et l’alcalinité dans l’organisme ». C’est-à-dire qu’un organisme en état d’acidose métabolique, soit une acidité excessive du sang, subit l’accumulation de déchets acides. Mais le problème réside surtout dans la difficulté à évacuer ces déchets.

Un pH sanguin trop acide contraint en effet le corps à puiser dans les tissus minéraux alcalins, soit calcium, potassium, magnésium et sodium. Cette action du corps vise à retrouver l’équilibre entre acide et basique, faisant office de système tampon pour réduire la haute échelle d’acidité.

Cette acidose provient en fait de la molécule de sodium, trop grosse par rapport aux autres molécules présentes dans l’organisme. Ce sont généralement les aliments salés et certains aliments acides qui provoquent l’acidose de l’organisme. On l’a dit plus haut, le corps sait puiser ailleurs pour retrouver un bon équilibre, d’où les carences en minéraux chez certains. Lorsque l’organisme puise trop dans les réserves de calcium par exemple, il perd de ses capacités physiques en raison de la déminéralisation des os. Chez les sportifs, les tendinites peuvent survenir puisque les tendons se durcissent et se fragilisent. On n’insiste donc jamais assez sur l’importance de consommer des fruits et légumes, source riche en minéraux alcalins, réduisant par la même occasion les risques d’acidose.


  • Calcium (lait, amandes, épinards, haricots secs) : composant essentiel des os et des dents, nutriment indispensable au système nerveux, au muscle et au cœur
  • Iode (poissons, produits laitiers, œufs, algues marines) : fonction thyroïdienne, production d’hormones thyroïdiennes qui interviennent dans de nombreux processus (croissance, développement du cerveau et santé osseuse), régulation du métabolisme
  • Fer (crustacés, brocolis, viande rouge, tofu) : amélioration des fonctions cérébrales et immunitaires, transport de l’oxygène dans le sang
  • Magnésium : impliqué dans certains processus cellulaires (production d’énergie, fonctionnement du système nerveux, contraction musculaire)
  • Manganèse (céréales complètes, noix, légumes feuilles, ananas, myrtille, son) : développement et activation d’enzymes impliquées dans la décomposition des aliments
  • Potassium (fruits, légumes feuilles, pommes de terre) : équilibre de la tension artérielle et métabolisme des fluides corporels, activation des fonctions nerveuses qui contrôlent les contractions musculaires
  • Phosphore (viande rouge, produits laitiers, poissons, volailles, céréales complètes, légumineuses, noix) : construction d’os solides et libération de l’énergie provenant des aliments
  • Sélénium (noix du Brésil, œufs, viande rouge, poisson) : bon fonctionnement du système immunitaire et lutte contre les radicaux libres (ceux-ci accélèrent le vieillissement des cellules et des tissus)
  • Zinc (crustacés, viande rouge, œufs, pois chiches) : soutient le système immunitaire, la production d’hormones et la fertilité, réduit l’inflammation de la peau et la cicatrisation des plaies, protège contre les dommages causés par les rayons UV du soleil

Liste tirée du Grand Livre de la Nutrition, par Lambert Rhiannon : "Les minéraux, qu'est-ce que c'est ?" (p. 22-23)


Quand le ventre devient facteur limitant

On l’a compris, un trop haut niveau d’acidité engendre des conséquences plutôt désagréables, notamment les fameux troubles gastro-intestinaux. L’organisme dans ce cas digère mal les protéines, les glucides et les lipides. La flore intestinale ainsi perturbée, elle entraîne de mauvaises sensations, comme les ballonnements ou les lourdeurs.

Les causes physiologiques, tout d’abord, s’expliquent dans la baisse importante du débit sanguin fourni au système digestif au cours de l’effort. Tout le sang est donc dirigé vers les muscles pour faire circuler un maximum d’oxygène, contre une irrigation vers le système digestif en temps normal. Après l’effort, les sensations peuvent être toujours aussi désagréables, voire accentuées. Pour cause, le retour subi de la circulation sanguine au niveau des régions lésées pendant l’effort. Aussi, le ventre n’est-il pas le deuxième cerveau ? Système digestif et système nerveux étant très reliés, l’anxiété quotidienne ou simplement l’anxiété pré-course impacte les mouvements intestinaux et réduit la capacité de l’organisme à absorber correctement les nutriments.

De manière très logique, les causes sont aussi mécaniques. La répétition des pas sur le sol, les mouvements à impacts, entraînent d’importantes vibrations chez les viscères, d’où la fragilisation de la paroi intestinale. Sur les longues distances les symptômes peuvent s’amplifier.

Enfin l’alimentation s’inscrit dans les causes de troubles digestifs, si elle est trop riche en gras et en fibres alimentaires, en épices ou en gaz. Il convient évidemment de courir 30 à 60 minutes après une collation, ou plusieurs heures après un vrai repas, le temps que la digestion s’achève.


Course à pied : bonne ou mauvaise pour le système digestif ?

Le système digestif perturbé au moment de l’effort subit la modification sanguine, puisque la priorité est donnée au cœur et aux muscles pour encaisser l’intensité de l’effort. Les mouvements de ballonnements liés aux impacts engendrent souvent des difficultés à s’alimenter, mais la bonne nouvelle, c’est que l’on peut habituer progressivement son corps. Forcément, en vue des impacts, le transit est accéléré. C’est là que les problèmes surviennent pour de nombreux coureurs, qui doivent parfois s’arrêter d’urgence.

Néanmoins la course à pied a ses avantages sur le système digestif ! D’abord une nette amélioration de la mobilité intestinale, puisqu’elle réduit la constipation en régulant les mouvements intestinaux. Elle stimule ensuite la circulation sanguine et permet d’oxygéner efficacement les tissus. C’est aussi une manière de réduire les problèmes digestifs liés à l’obésité, par un contrôle du poids.


L’estomac, cher allié

Et si je vous disais que l’estomac est un facteur de performance, au même titre que la préparation physique, l’entraînement en général, ainsi que le mental ?

Précisons d’abord que le corps humain est capable d’absorber 90 g par heure de glucides pendant l’effort. Pour les plus scientifiques qui s’intéressent au cheminement des glucides dans l’organisme, il existe trois transporteurs majeurs. Le SGLT1 (sodium-glucose cotransporteur 1), avec une capacité d’absorption d’environ 60 g de glucose par heure, recrute le sodium pour transporter les glucides à travers la membrane cellulaire. Le GLUT5 (glucose transporter 5), gère environ 30 g de fructose par heure. Enfin le GLUT4 (glucose transporter 4), vise à faciliter le transport du glucose dans les cellules, y compris les cellules musculaires grâce à l’insuline. Tout cela est très scientifique, mais permet de mieux comprendre le cheminement des glucides dans l’organisme et leur rôle au cours de l’effort. Ingérer des nutriments pendant la course maintient l’énergie suffisamment haut pour continuer sur la distance, réduire la fatigue et donner un vrai coup de fouet quand le coup de mou se fait ressentir. Sans l’ingestion de glucides, les réserves s’épuisent trop vite et à l’image d’une batterie vide, le corps fait face au mur.

Mais alors pour prévenir des symptômes gastro-intestinaux et préserver la fonction digestive, la solution se trouve dans l’hydratation, qu’elle contienne des glucides ou non. Car selon les études, la restriction de fluides pendant la course augmente la perméabilité intestinale. Jargon scientifique pour nommer « la capacité du système digestif à contrôler le passage des substances de l’intérieur du tube digestif à travers les cellules qui tapissent les parois intestinales vers le reste du corps ». C’est là que le Gut Training a son rôle à jouer, en entraînant son tube digestif à absorber les nutriments et les grandes quantités de fluides. Plus précisément, cela empêche l’eau de stagner dans l’estomac, c’est ce qu’on appelle la vidange gastrique. 



Lola Piffero


Sources

 



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